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LE VIOLON ALTO

En musique, l’alto dans tous ses états

Il faut avoir la peau dure lorsque l'on décide d’être altiste ! Souvent négligé, l’alto passe inaperçu au côté du violon et du violoncelle, mais à quoi ressembleraient les plus grandes œuvres classiques sans l’alto ?

 

Ressources : France Musique

Mozart : Quatuor à cordes n° 21 en ré majeur par le Quatuor Hanson

Mozart : Quatuor à cordes n° 21 en ré majeur 

On attribue souvent la genèse du quatuor à Joseph Haydn, mais c’est entre les mains de Wolfgang Amadeus Mozart que l’ensemble est véritablement sublimé. Formation incontournable de la musique classique, le quatuor est souvent une conversation entre les deux violons ou entre le premier violon et le violoncelle, mais il ne faut pas oublier l’alto ! Véritable trait d’union entre les voix chantantes des violons et le poids mélodique du violoncelle, l’alto est souvent le centre harmonique de l’œuvre. 

Malgré le fait qu’il n’ait jamais composé une œuvre pour l’alto solo (ni pour violoncelle, par ailleurs), il est à noter que Mozart admirait profondément l’instrument pour sa chaleur sonore et son rôle unique dans l’orchestre et notamment dans le quatuor. Ainsi, Mozart jouait souvent l’alto lors des premières interprétations de ses propres quatuors, terrain de jeu musical où l’alto est situé au même rang que ses collègues.

Beethoven : Trio en ut mineur op 9 n°3

 

Il est sans doute inutile de présenter Ludwig van Beethoven pianiste, instrument de prédilection du compositeur colérique, mais on connait moins le Beethoven altiste. Aussi, alors que le compositeur poursuit à Bonn ses études de l'orgue et des instruments à clavier, il est également initié au violon et à l’alto par Franz Georg Rovantini et Franz Ries.

Organiste de la Hofkapelle de Bonn à 14 ans, il deviendra 5 ans plus tard altiste dans ce même ensemble. Il est donc peu surprenant d’apprendre que le compositeur envisagea lors de sa carrière d’écrire une sonate pour alto, qu’il abandonna après seulement une dizaine de mesures ! Si Beethoven ne consacre jamais de son vivant une œuvre pour l’alto seul, sa musique de chambre vient largement compenser ce manque, répertoire à travers lequel les capacités musicales de l’alto sont pleinement exposées et exploitées.

Beethoven : Trio en ut mineur op 9 n°3, par le Trio Vuillaume

Berlioz : Harold en Italie (Orchestre national de France / Emmanuel Krivine)

Berlioz : Harold en Italie 

 

Summum de l’ironie, l’instrument mal-aimé n’est pas mieux sublimé au début du XIXe siècle que par Hector Berlioz, compositeur largement boudé en France de son vivant. Composée en 1834, la symphonie Harold en Italie porte un sous-titre étonnant : Symphonie avec un alto principal en 4 parties. Commande de la part de Niccolò Paganini, l’œuvre est l’une des premières à mettre en avant l’alto, jusqu’alors dépourvu d’un répertoire digne de ce nom. 

Grand admirateur de la beauté de l’instrument et de ses possibilités lyriques, Berlioz écrit dans son Traité d'instrumentation et d'orchestration :

« De tous les instruments de l’orchestre, celui dont les excellentes qualités ont été le plus longtemps méconnues, c’est l’alto. [...] Son timbre attire et captive tellement l’attention [...] et les qualités expressives de ce timbre sont si saillantes que, dans les très rares occasions où les anciens compositeurs le mirent en évidence, il n’a jamais manqué de répondre à leur attente. » 

Inspiré de ses pérégrinations dans les Abruzzes en Italie, Berlioz fait de l’alto une sorte de « rêveur mélancolique » à l’instar du Childe-Harold de Lord Byron, dont il s’inspire profondément.

Brahms : Sonate pour alto et piano op. 120 n° 1 

 

Sensible au rôle particulier de l’alto dans la musique de chambre ainsi qu’à sa richesse sonore et lyrique, Johannes Brahms montre une fascination pour cet instrument tout au long de sa carrière. Par exemple, dans la Sérénade pour orchestre no.2 op.16 (1860 et révisée en 1875), Brahms supprime tous les violons afin d’ajouter plus d’altos. En 1884, il compose pour son ami le violoniste (mais aussi altiste) Joseph Joachim et sa femme Amalie Schneeweiss les Zwei Gesänge für eine Altstimme mit Bratsche und Klavier op.91 [Deux Chants pour Voix d'alto, Alto et Piano, op.91].

Dix ans plus tard, Brahms compose ses fameuses Sonates pour clarinette op.120 no.1 et 2. Seulement quelques jours après avoir envoyé les manuscrits à son éditeur, FritzSimrock, Brahms décide de transcrire ses sonates émotionnellement turbulentes pour la sonorité riche et le lyrisme coloré de l’alto. Il compose ainsi pour ce dernier l’une des plus grandes œuvres de son répertoire, et ce encore près d’un siècle et demi plus tard.

Brahms : Sonate pour alto et piano op. 120 n° 1 (2e mvt) (A. Tamestit, B. Chamayou)

György Kurtág : "Jelek" (extraits) joué par l'altiste Odile Auboin

György Kurtág : "Jelek"

 

Contrairement au violon et au violoncelle, l’alto est le dernier de la famille des instruments à cordes à pouvoir revendiquer pleinement son statut en tant qu’instrument de soliste. Aussi, son répertoire est encore en pleine croissance, auquel les compositeurs des XXe et XXIe siècles contribuent sans relâche, notamment le grand compositeur hongrois, György Kurtág.

Composé entre 1987 et 1992, Jelek, játékok és üzenetek(Signes, jeux et messages) est une collection de courts aphorismes musicaux pour alto de durées variables qui illustrent de nombreux traits stylistiques de Kurtág, tels que la brièveté, la fragmentation, l'ambiguïté et l'intertextualité. Selon le musicologue François-Gildas Tual, ces miniatures « relèvent de la miniature pour revenir à l’essence de la musique, à la note elle-même, graphique et sonore».

Date de dernière mise à jour : Ven 07 jan 2022